Le Sahara reçoit deux fois plus de soleil par an que l’Europe, de quoi fournir de l’énergie verteen grande quantité à des milliers de foyers et d’entreprises. Une chance à saisir pour l’Unioneuropéenne qui a pour objectif de consommer 20% d’énergies renouvelables d’ici 2020 ou un casse-pipe financier?
Est-il possible de construire plusieurs centrales solaires en Afrique du Nord et transporter cette électricité vers l’Europe via la mer Méditerranée? C’est la question que s’est posée Desertec Industrial Initiative (DII). Au cours de l’année écoulée, 30 entreprises européennes ont rejoint la DII, un consortium qui cherche un investissement monumental de 560 milliards de dollars (410 milliers d’euros) pour des installations solaires et des éoliennes en Afrique du Nord, à répartir sur les 40 prochaines années.
Dans cette optique, la DII est en train de terminer une étude de faisabilité et espère entamer la construction de sa première centrale d’ici 2013. Un groupe distinct d’entreprises appelé Transgreen, créée en juillet 2010, travaille également sur les projets concernant les milliers de kilomètres de lignes à haute tension qui seront nécessaires à l’exécution de cette transmission d’envergure sous la mer Méditerranée.
Intérêts complémentaires
Le défi est immense: ils doivent trouver un accord avec de nombreux pays, sur les deux continents, pour mener à bien l’un des plus grands projets d’infrastructure de l’histoire. Mais l’idée semble intéresser de grands groupes, dont l’allemand Siemens, le groupe helvético-suédois ABB, l’espagnol Abengoa Solar et la société First Solar d’Arizona.
Ces sociétés ont des objectifs propres mais finissent par devenir complémentaires: moins dépendre du gaz russe pour certains, lutter contre le réchauffement climatique pour d’autres, etc. Mais la complexité du projet reste énorme. Certes, le soleil saharien garantit de l’électricité en continu, de là à atteindre l’Europe, il reste encore beaucoup d’obstacles à franchir!
Coût immense
Sans oublier une question cruciale: quel sera le coût global de cette production? Selon les calculs du consortium, les coûts de l’électricité solaire sont actuellement quatre fois plus élevés que les centrales au charbon ou au gaz par kilowattheure, qui voudra de cette énergie verte mais coûteuse? Evidemment, en cas de réussite, les coûts diminueront et cette énergie renouvelable pourra concurrencer les énergies fossiles.
En attendant, l’appui politique en Afrique du Nord pose aussi question. Alors que le Maroc, la Tunisie et l’Egypte soutiennent le projet, l’Algérie veut développer ses propres centrales solaires. Certains Européens sont également critiques: ils estiment cette réalisation trop ambitieuse et trop compliquée à réaliser alors que d’autres solutions existent en Europe.
Grand projet contre petites réalisations?
Mais pour les convaincus, il est évident que l’ensoleillement en Europe n’est pas suffisant. Le Sahara permettrait justement des installations de grandes envergures avec une technologie connue sous le nom d’Energie Solaire Concentrée (ESP): la chaleur est extraite et stockée progressivement afin que l’électricité soit produite en continu.
Mais le projet risque vite de rester coincé à l’un ou l’autre niveau de décision et d’une grande réalisation, on risque vite une division en une série de petits projets. Certains pays européens pourraient sortir du consortium pour conclure des accords plus rapides avec les fournisseurs d’Afrique du Nord.
Le Maroc, par exemple, a déjà annoncé des projets de construction pour des centrales solaires vouées à son propre usage. Mais le pays a besoin de subventions, il pourrait donc faire équipe avec l’Espagne ou la France pour recevoir une aide financière en échange d’une part de la production. Alors le soleil saharien a-t-il une chance de réchauffer les maisons européennes tout en diminuant le réchauffement climatique? La réponse sera donnée dans quelques années.
Source : 7sur7.be