Grâce aux Jambar Tech Awards, certaines initiatives « made in Sénégal » ont été mises en lumière et parmi elles, nominée dans la catégorie « meilleur entrepreneur social », Chérif Ndiaye fondateur de la plateforme web Ecoles au Sénégal. Actu’elle a rencontré cet entrepreneur réputé dans le milieu des TIC comme étant une référence en terme de marketing, dans les locaux du CTIC (incubateur TIC), dans le centre ville de Dakar. Dans un petit bureau de deux pièces, Cherif Ndiaye et ses collaborateurs tissent patiemment une partie de la toile du World Wilde Web. Le principe d’Ecoles au Sénégal est simple : offrir des cours sur le web en forma vidéo du système éducatif gratuitement aux élèves et autres internautes désireux apprendre. Cette démarche, qui étonne par son altruisme, semble aussi évidente que nécessaire.
Chérir Ndiaye, fondamentalement passionné par la communication et le marketing, a aussi une solide expérience en finance. Après des études de commerce à l’Institut supérieur de management, où, après avoir obtenu son diplôme, il y acquiert également ses premières expériences professionnelle comme conseiller en communication avant de rejoindre 2 ans plus tard l’APIX où il eu comme principale mission le suivi et l’évaluation des projets agrées pour une meilleure optimisation des titres d’exonérations. Après ce passage à l’APIX il prend goût à l’entrepreneuriat grace aux contacts quotidiens avec ces bâtisseurs de l’économie mais il juge prématuré de ce lancer dans pareil aventure, il intégre de grosses entreprises Euro RSCG (3ème agence mondiale de communication, et 1ère en Europe) en qualité de responsable commercial pour l’Afrique de l’Ouest et du Centre Cette société se retirant du marché africain (sauf l’Afrique du Sud), il rejoint le groupe PCCI en qualité chef de vente.C’est son premier contact fort avec le secteur TIC, via les centres d’appel, où il apprend, dit-il, beaucoup. Mais il sait depuis toujours que son but est d’être son propre patron. A 29 ans, il démissionne et, tout en étant consultant, monte sa première entreprise, « Sign Up », un centre d’appel, avec un ami rencontré à la Jeune Chambre Internationale, un club de jeunes leader, et l’appui financier de sa mère. Cherif Ndiaye y initie un produit local appelé « Sama Keur », un service téléphonique d’intermédiation immobilière. Cette société est à ce jour une agence de communication et de conseil.
Actu’elle : Comment est née l’idée d’Ecoles au Sénégal ?
Cherif Ndiaye : A Sign Up, chaque mercredi, je recevais trois élèves de terminal pour les aider sur quoi faire après le bac. Je consacrais bénévolement une heure par élève. Je donne aussi des cours de marketing et de développement personnel depuis quelques années dans certaines écoles de formation et je me rendais bien compte des disfonctionnement du système d’enseignement. Ceux qui sont dans le public ont souvent un niveau inférieur à leurs camarades du privée et cela s’expliqué par le volume horaire très bas consommé par ces élèves de l’école publique et cela ce fait ressentir annuellement par les résultats catastrophiques au bac « 31% de réussite en 2014 ». La pertinence du projet www.ecolesausenegal.com ce justifie du fait qu’on est dans un pays où il y’a un manque de professeur aussi bien en nombre qu’en qualité surtout au niveau des matières scientifiques. En région dakaroise, le problème ne ce fait pas sentir comme en région où on voit souvent des classes et même des écoles entières sans professeurs de Maths, de SVT ou de PC en plus du nombre pléthorique des élèves avec des classes qui font plus de 50 élèves. Dans de pareil cas, l’enseignant valide juste un niveau minimal de compréhension qui ne dépasse pas 10% car ce dernier est aussi démotivé car pensant qu’il est mal payé même s’il est le seul à bénéficier de 3 mois de congés payés.
Au départ, je voulais mettre en place juste une plateforme qui puisse simplement donner des informations sur les écoles au Sénégal. J’ai réfléchis à ce que je pouvais encore faire de plus face à cette crise scolaire répétitive, et j’ai pensé que des cours en ligne serait une solution alternative pour résoudre ce fléau. Nous avons démarré par mettre en ligne l’ensemble du programme, de la sixième à la terminale et après un an d’activité, nous nous sommes rendu compte que les élèves se limités à la page d’accueil. Nous avons fait une étude sur un échatillon de 1.000 éléves et les croiser aux chiffres que nous avons et cela est venue conforter notre argumentaire qui était que les jeunes ne lisent plus et préfèrent regarder des films sur internet. Nous avons alors décider de faire une refonte du site à nous adaptant à notre public cible constitué d’élèves. C’est ce qui donne aujourd’hui cette version cours 100% vidéos qui est loin d’être évident dans le contexte local pour voir des professeurs de qualités accepter de se faire filmer et de le mettre sur la toile. Nous avons donc fait à plusieurs obstacles que nous surmontons quotidiennement qui nous a permis au jour d’aujourd’hui d’avoir en ligne tout le programme Mathématiques terminale S1 et S2, c’est à dire plus de 300 vidéos et cette année, nous avons démarré la production des cours de Philosophie, Anglais, Histoire Géographie, Français, SVT et PC toutes séries confondues pour la terminale et la troisième. C’est dire d’ici la fin de l’année scolaire, nous aurions plus de 1.000 cours et exercices en ligne. Il est important de préciser que c’est un projet social mais cela ne signifie pas que mes collaborateurs « professeurs, collègues » sont des bénévoles, le seul qui l’est c’est moi et les charges de production sont vraiment importante et seul il m’est très difficile de tenir financièrement et techniquement.
A : Quels sont vos objectifs pour cette plateforme d’enseignement en ligne ?
CN : L’objectif avant tout est de permettre aux élèves d’avoir accès à des cours de qualité par des professeurs de qualité. Nous ne prenons que des professeurs avec une force expérience et qui sont également titulaires dans les lycées. En résumé, nous essayons d’avoir les meilleurs de chaque discipline et pour chaque matière, nous avons 3 professeurs. Le même cours peut être donné par plusieurs professeurs, ce qui fait que les professeurs prennent le soin de bien préparer le cours ce qui n’est pas souvent le cas dans le système traditionnel classique. Notre objectif en 2017 est d’avoir tout le contenu de la troisième à la Terminale. Nous allons y arriver car nous avons un rythme de production de trois vidéos par jour.
A : Comment comptez-vous avoir un retour sur investissement, étant donné que les consultations des cours sont totalement gratuites ?
C.N : C’est l’écharde de ce projet ! On me pose souvent la question. Pourquoi investir autant d’argent dans quelque chose qui est gratuit. Mark Zuckerberg a fait Facebook, une entreprise sociale aujourd’hui cotée en bourse. …Ecoles au Sénégal, un jour, sera cotée en bourse aussi ! Mais je ne cherche pas la publicité et je n’ai pas investit pour gagner forcément de l’argent, je le fait pour servir ma communauté car je demeure convaincu que c’est un projet à fort impact social. La richesse d’Ecoles au Sénégal, c’est sa communauté car même le téléchargement des cours est gratuit. Il est certain que j’attends du soutient, seul je ne peux pas tout faire. Nous avons fait le tour des entreprises de la place, et aucune ne nous a suivi pour l’instant. On préfère financer la lutte que l’éducation ! Jusqu’à ce que je rencontre la Directrice de la Fondation France Télécom, qui m’a proposé de postuler à un concours qui nous a permis d’obtenir un fond pour tenir la première année et cela nous a permis de boucler le programme Maths terminale S. Je viens de signer une convention avec Neurotech qui a une politique RSE et cela nous permettra de renforcer notre matériel de production mais également faire venir la CONFEMEN pour étendre le projet dans la zone des pays membre de cette confédération francophone. Nous avons eu a bénéficier également d’un financement lors de l’organisation du dernier sommet de la francophonie. Nous attendons un soutien de taille de l’Etat du Sénégal pour un partenariat public privé car il est important de signaler qu’au Sénégal le statut d’entreprise sociale n’existe pas ce qui fait que je fait porter le projet par mon agence de communication Sign Up.
A : Qui regarde ce site? Est ce que dans les autres pays francophones vous avez des visiteurs?
CN : Les statistiques sont étonnantes. C’est très regardé dans le Maghreb, notamment le Maroc, où on m’a invité pour voir comment y adapter une version similaire, en Cote d’Ivoire, en Mauritanie, au Bénin. Nous sommes aussi très regardés en France ! En dehors de Dakar, ce sont les autres pays qui regardent nos vidéos. Plus que nos régions.
A : Que pensez-vous du développement des NTIC au Sénégal ?
CN : Le Sénégal va être un « hub » de cet écosystème du numérique en Afrique. Nous testons actuellement la 4 G. Notre débit est excellent comparé avec d’autres pays. Techniquement le Sénégal a tout les atouts pour se positionner comme noyau central de l’Afrique Francophone. L’Etat ne semble pourtant pas avoir compris le rôle d’accélérateur que les TIC doivent avoir dans le développement. Le budget du ministère de la télécommunication est trop faible. Mais la volonté citoyenne est là. Il y a d’autres activistes, des « serial entrepreneurs », qui sont souvent plus connus et respecté hors du pays. Pour en citer quelques-uns : People In put, fondé par Serigne Baro, qui en terme d’implantation technologique sont la référence de l’Afrique de l’Ouest. Byfilling dans la conversation digitale mais également des jeunes influents, font beaucoup de veille, et ont très bien compris le système, comme Aboubacar Sadikh, qui a écrit un ouvrage sur le sujet (le Web 2 .0), Cheick Fall, à l’initiative d’une fédération des bloggeurs au Sénégal, qui sont très influents, et Charles Sanchez, bloggeur, juriste de formation, et défenseur des droits des femmes. Ces personnes poussent à la liberté d’expression, et aident à la diffusion d’informations et de contenus.
ENCART
Le web et les femmes
Pour les femmes, et pour tous, il est certain que le web est un accélérateur d’émancipation, donne énormément de liberté, et permet d’avoir confiance en soi, grâce aux réseaux sociaux, suivant les gens avec lesquels vous conversez. Les femmes peuvent s’exprimer de manière plus libre et influencer leur communauté à leur guise.
Dans le Magazine Actu’elle janvier 2015 – Coup de cœur.
Propos recueillis par Laure Malécot